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Contribution de Christine Vallin sur le rôle du maître

Entre la disparition totale du maître...

Un idéal peut-être, basé sur la Théorie de la réminiscence de Platon : l'homme "sait" déjà. L'élève est "capable", sans conditions, sans hésitations. Il suffit de le laisser faire. De la même manière, le groupe s'autogèrera tôt ou tard.

J'ai toujours l'impression d'un cercle dans cette approche, d'un Tout, d'Un : maître et élèves en symbiose, tout est philosophie, toute parole est philosophique et le sujet est l'objet, (je prends pour illustrer, une phrase de Jean-François Chazerans "Il n'y a pas de question spécifiquement philosophique car l'objet du philosopher est pour moi le sujet philosophant."). C'est "beau". Il y a quelque chose de féminin, de maternel, de fusionnel et d'accueillant dans cette vision. Mais je n'arrive pas à y croire tout à fait. Je voudrais juste viser vers cet idéal pour tirer la sonnette d'alarme en cas de dépassement de "pouvoir".

L'acceptation d'un maître...

Pour moi la figure du maître n'est pas forcément aliénante, je considère à la manière de Marc-Aurèle recensant toutes les personnes qui ont traversées sa vie et ont influées sur lui, qu'il n'y a pas de sujet "spontané", que nous sommes des "fils de" multiples êtres sans pour autant leur être soumis ni à avoir à les tuer. Et que nous pouvons à l'occasion devenir des "pères de" sans en rougir. Et un père, ou un maître, ou un animateur ici, s'agissant de la discussion philo, ce serait avant tout celui qui mettrait en déséquilibre ...

Et sa présence pour mettre en déséquilibre

Et là, les rôles possibles, souhaitables peut-être, ne manquent pas. Il pourrait s'agir

a.. D'aider à sortir des idées préconçues en opposant des arguments nouveaux ou en les provoquant.
b.. De veiller à la formulation des questions incitant au retournement de la réflexion, « penser l'impensable » (ex : peut-on ne pas être raciste ? )
c.. D'accompagner l'élève dans sa réflexion selon la maïeutique socratique ?
d.. D'« Aiguillonner » comme le dit Socrate « C'est ainsi, je crois, que le dieu m'a attaché à la ville : je suis le taon qui, de tout le jour, ne cesse jamais de vous réveiller, de vous conseiller, de morigéner chacun de vous et que vous trouvez partout, posé près de vous. »
e.. D'éviter des écueils dialectiques (« L'apprenti philosophe » O Brenifier)
f.. De veiller à une démarche philosophique en insistant avec une exigence forte sur la définition des concepts, sur la logique dans les idées, sur la cohérence du discours, sur l'argumentation des idées avancées.
g.. D'ouvrir des espaces de réflexion nouveaux, par exemple en apportant des idées, textes de philosophes ou écrivains
h.. De faire des liens entre les idées venues des élèves et des idées de philosophes (ex : « quel a pu être le premier mot dit sur la terre ?» après propositions des élèves, apporter la vision de Rousseau)
i.. De tenter de faire passer du paraître à l'être, du brillant à ce qui ne se voit pas, de l'évidence qui « saute aux yeux » à la subtilité.
j.. De créer, de faire apparaître le manque pour qu'émerge le désir de savoir.

Entre une première figure maternelle bienveillante, discrète et une figure paternelle qui s'impose, exigeante, mon coeur balance...

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Date de création : 02 septembre 2002
Date de révision :
redaction@pratiques-philosophiques.net