Proposition de synthèse du « corpus »

soumise à la réflexion critique commune

Par Nicolas Go (janvier 2003, GER)

Les références (T1, T2…) renvoient aux textes du corpus par ordre alphabétique (constitué par Michel Tozzi), mais qui ne sont pas systématiquement mentionnés (chacun s’y reconnaîtra), et ils ne sont qu’indicatifs (tous les mentionner serait trop rébarbatif, et de nombreuses propositions renvoient à plusieurs textes différents, avec des nuances parfois marquées) ; les paragraphes que je propose méritent d’être discutés, sans doute réordonnés, renommés. Comme on n’en est pas encore au stade de la théorisation ,ma synthèse reste rapide..

I/ dispositif de l’action

« faire qu’il se mettre en place une discussion collective », « constituer une communauté de recherche T17 »

-         se préparer à enregistrer (T14), filmer (T24), ou noter les séances

-         utiliser (éventuellement) le tableau T23

-         se disposer en cercle (ou toute autre disposition favorable aux échanges oraux), y compris le professeur, afin que les élèves puissent s’adresser les uns aux autres

-         réguler la prise de parole (incorporation des règles, voire « bâton de parole » ou microphone), distribuer la parole dans l’ordre où elle a été demandée

-         instituer l’écoute mutuelle et attentive (« s’entendre », c’est reprendre pour soi ce qui est énoncé par autrui T8)

-         instituer le respect, et l’abolition de la moquerie

-         instituer l’examen critique des énoncés

-         éventuellement, constituer des groupes réduits T4

-         inscrire à l’emploi du temps T22

-         outre les synthèses et reformulations en cours de discussion, résumer  en fin de séance, et rappeler les acquis en début de séance suivante T24

-         le professeur constitue un exemple (offert à la mimesis), il valorise T31 et guide, mais limite ses interventions (cf ci-dessous), il sollicite la mobilisation des expériences et des connaissances

Le travail se conçoit dans une triple exigence T23-27-29 :

-un dispositif de discussion démocratique (rapport au pouvoir), qui implique une construction sociale coopérative

-l’apprentissage de la pensée rationnelle (« habiletés cognitives »), qui implique une structuration des échanges

-le questionnement proprement philosophique, qui engendre une culture dans la classe, présente comme mémoire didactique

De sorte qu’il convient de bien associer, dans notre effort, la topogénèse (répartition, identification des rôles, des tâches, organisation de l’espace) et la chronogenèse (constitution d’une mémoire didactique, avancée de la réflexion dans le temps)

Le fonctionnement du dispositif nécessite également de la part du professeur :

-une préparation personnelle T18 afin d’améliorer la qualité de ses interventions dans la discussion, par la fréquentation de textes et d’auteurs, un travail sur le vocabulaire, les définitions, les distinctions conceptuelles, l’élaboration de questions problématiques, l’interrogation des évènements de la vie quotidienne

-une préoccupation d’investir en classe, quotidiennement, le fruit de la réflexion commune (afin de ne pas séparer les séances de discussion –hebdomadaires- du vécu  -permanent-)

La détermination du sujet de discussion peut dépendre de :

-un événement quelconque, partagé par la communauté, qui peut surgir de la vie de la classe ou être rapporté, et qui provoque une interrogation T9

-un choix collectivement consenti, à partir d’une proposition d’élève ou du professeur

-un texte découvert (album, roman, extrait…)

Cela manifeste l’intention de ne pas scolariser artificiellement la séance de philosophie (qui deviendrait une « matière à enseigner »), et de ne pas se limiter aux simples échanges discursifs (pour faire l’expérience réelle, individuelle et commune, de la philosophie T13)

 

II/ L’action du professeur (« le rôle du maître »)

1/ sa fonction

Selon une visée démocratique (garantir l’égalité) et didactique (garantir la communication), il crée les conditions de l’avènement d’une  pensée philosophique T29 ; instituer la discussion dans le groupe afin de permettre le « dialogue intérieur » (« de l’âme avec elle-même ») qui est élaboration de la pensée T8

-         « ferment catalytique » T9, il déclenche, provoque, étonne, crée la rencontre, le doute… là où priment les opinions, les passions, les évidences et les certitudes, là où l’usage de la raison n’est pas spontané ;

-         « déconstructif » (mise en question, doute…) et « constructif » à la fois T27 :

-         éducateur : il favorise la construction des savoir, savoir-faire, savoir-être, et la formation de l’esprit (pensée rationnelle) ; il manifeste une exigence de vérité T19 et une attente d’évolution significative et durable (il ne fait pas d’animation de groupe) ; il met au défi de penser (ne se contente pas de donner la parole)

-         médiateur T8-9-15-27 (au même titre que le groupe lui-même) : comme tel il vise l’autonomie de l’élève, et du groupe (penser par soi-même avec les autres, élaborer un savoir en commun)

-         expert (« vecteur du philosopher T11»), éduque à problématiser, argumenter, conceptualiser, enrichit la discussion par des références philosophiques (auteurs, textes, thèses, écoles…), « élève le niveau du débat T23 », rend les élèves familiers avec la culture philosophique

-         référent : garant des rapports d’égalité, et des codes sociaux de la communication ; il construit un cadre sécurisant T7-32 ; il exemplifie le « chercher » (distinguer la discussion de l’entretien par exemple) T8, il est un « modèle postural » T26

-         il valorise les découvertes, les réussites, les contributions T31

-         il sollicite le lien entre les séances de discussion philosophique et le vécu quotidien de la classe (et hors l’école) T13

-         il programme (idéalement) son auto-disparition T9-11

-         il reste une personne singulière, subjective (respecte les règles, donne son avis s’il s’assure de ne pas contrarier le « penser par soi-même »)

-         il produit des outils didactiques

2/ son action (typologie des actes didactiques)

elle paraît s’effectuer selon trois ordres corrélatifs :

a/ dans la négativité :

-         limiter ses interventions (le sens de ce « limiter » reste à préciser, et donne lieu à des interprétations fort diverses)

-         s’interdire de prendre position ou parti, « pour ou contre » (cela mérite également d’être précisé, justifié)

-         ne pas chercher à transmettre un savoir constitué

-         ne pas penser, décider, parler pour les autres T4 (respect de l’autonomie)

-         s’interdire de juger « c’est bien, c’est nul » (idem)

-         ne rien préjuger de ce qui peut ou doit être dit

-         ne rien « postjuger » T8 (reconnaître, situer, relier, confronter…)

-         accepter de ne pas savoir répondre, de se donner du temps pour réfléchir

-         accepter de ne pas maîtriser totalement le processus d’apprentissage (tout en veillant à ce qu’il soit effectif) T7

b/ selon l’exigence de cohérence logique, rationnelle, rhétorique, argumentative

-         reformuler

-         rappeler les acquis antérieurs

-         solliciter les expériences partagées, la mémoire didactique de la classe

-         mettre en évidence les liens entre les différentes propositions des élèves

-         …                            les paradoxes

-         …                       les contradictions

-         …                       les oppositions

-         …                       les imprécisions, les confusions T15-27b

   et guider la confrontation

-         sensibiliser aux redites, aux périphrases

-         préciser la nature de l’intervention d’un élève (tu viens de donner un exemple, tu proposes une nouvelle définition…) T23

c/ par sa contribution personnelle

-         apporter des précisions de vocabulaire, définitions, distinctions

-         informer de la thèse d’un auteur portant sur l’argument en question

-         citer une formule, apporter un texte T30

par ailleurs :

-         exemplifier ce que vouloir dire chercher T27a

-         faire que les élèves s’approprient le questionnement, les remarques, la démarche intellectuelle

mais surtout :

-    saisir les opportunités (le kairos) T13

-    poser ou formuler une question problématique, questionner, énoncer une remarque heuristique ;     favoriser ainsi la dynamique sociale et intellectuelle de la discussion, provoquer le dépassement des obstacles (principalement lorsque les propositions s’enferment dans la répétition du même T26) :

ces points méritent d’être très sérieusement étudiés

P.S. : Pour les débutants, on pourrait envisager de concevoir une fiche guide, une fiche-conseils comme l’évoque le T4, peut-être sous deux formes : une très simple, désignant les actions essentielles, et une plus complète, éventuellement à la manière ci-dessus, mieux développée et conçue ?

Date de création : 09 mars 2003
Date de révision :
redaction@pratiques-philosophiques.net