Le rôle du Maître
dans la discussion philosophique
Nicole Roux, Professeur
des écoles, école Gourgan, RODEZ
« Que
tu deviennes professeur, savant ou musicien, ait le respect du sens
mais ne t’imagine pas qu’il s’enseigne. »
(1)
Face
à la nouveauté du rôle du médiateur dans l’atelier philosophique se
posent à l’enseignant de multiples interrogations et une grande inquiétude
qui, en lui ôtant l’assurance pétrie d’habitudes professionnelles lui
révèlent une capacité, une qualité de réflexion souvent insoupçonnées
chez l’enfant de sept ans.
Ce nouveau regard porté
sur l’élève est positif à plusieurs titres et pas seulement pour l’apprenant
lequel, conscient de ce changement d’écoute, de l’intérêt suscité par
ses paroles, est amené à modifier son rapport au savoir. Autorisé à
dire devant ses pairs, y compris devant l’enseignant en qui il découvre
un interlocuteur possible, l’élève va s’intéresser aux possibilités
offertes par le langage pour y parvenir et, tout naturellement, le conduire
à se poser des questions et à « parler vrai ». L’attitude
de l’enseignant vis-à-vis des enfants se trouve donc modifiée car il
devient véritablement « observateur actif » de leur
cheminement. Son intervention et ses attentes sont mieux adaptées à
ce que l’enfant peut faire. Cherchant davantage à leur poser des problèmes
qu’à attendre des réponses, il est amené à parler moins et à susciter
davantage l’échange. Le tâtonnement de l’élève, ses erreurs sont vus
comme des tentatives de compréhension.
Le
souci de l’enseignant est donc nous seulement de se positionner comme
chercheur en quête de situations aidantes mais de placer également l’élève
comme chercheur sachant qu’il faut apprendre à réfléchir ensemble, à
savoir travailler en équipe. Ainsi, il va moins œuvrer à l’intuition,
et essayer de porter un regard plus scientifique sur les réalisations
de ses élèves. Le rôle de l’enseignant est déterminant, en ce sens qu’il
doit avoir « la capacité d’accueillir, de solliciter, de prendre
en compte la parole de chacun » (2), pour l’amener à utiliser
le langage oral et écrit afin d’enrichir sa pensée.
La
classe se trouve véritablement transformée par cette nouvelle pratique
et l’enseignant lui-même conséquemment transformé par elle.
(1) Hesse H., Le
jeu des perles de verre, Calman-Lévy, Paris, 1995, p. 545.
(2) Bouillet A., A la recherche
d’une éducation esthésique, CERFEE, U.P.V., 2001, p. 189