DIFFICULTES ET QUESTIONS POSEES

 PAR ET SUR LA PRATIQUE

DE LA DISCUSSION PHILOSOPHIQUE EN CLASSE

                                              (Envoyez tous les compléments possibles à M. Tozzi, 2 rue de Navarre 11100 Narbonne. Tél/fax 04.68.65.36. E-mail :       michetozzi@aol.com)

- Difficultés des élèves : passer de l'exemple ou de l'anecdote à la définition d'un mot-notion (conceptualiser) ; de l'exemple comme argument à l'argument comme (bonne) raison (argumenter) ; distinguer la valeur probatoire du contre-exemple par rapport à l'exemple, qui en soi ne prouve rien. Ne pas recevoir l'objection contre une idée comme une agression contre sa personne. Arriver à se maîtriser. Ne pas se sentir propriétaire de ses idées. Bref passer du perçu au conçu, du narratif à l'argumentatif, de l'affect au concept. Savoir écouter les autres. Mais aussi être cohérent, savoir (se) mettre en question etc.

- Difficultés de l'enseignant : comment utiliser l'exemple, le narratif-descriptif pour ancrer le débat dans le vécu des élèves, en faire un matériau d'analyse, et ensuite le dépasser dans et par la conceptualisation ? Comment progresser d'exemples accumulés à ce qui leur est commun pour conceptualiser ? Quelle utilisation du contre-exemple ?

Comment prendre en compte les dimensions affective et sociale, et pas seulement cognitive ? Comment désembourber de l'affectif pour travailler le cognitif ? Comment réguler les conflits socio-affectifs ? Comment provoquer des conflits socio-cognitifs ?

Comment être à la fois rigoureux et convivial dans la discussion philosophique (DP) ?

Comment écouter attentivement un élève pour le comprendre, lui laisser le temps de formuler sa pensée, et gérer en même temps le groupe (qui peut se dissiper) ? Comment articuler discussion avec un seul et discussion collective ? Quand deux élèves discutent, comment recentrer le " dualogue " sur du dialogue collectif ? Quand s'adresser aux individus et au groupe-classe ?

Comment gérer en même temps (surcharge cognitive) la discipline dans le groupe, les tours de parole, la compréhension de ce que disent les élèves, la reformulation et la progression du débat ?

Comment distribuer la parole quand beaucoup la demandent en même temps ? etc.

                                  QUESTIONS GENERALES

- Quelles finalités poursuivies dans une DP ?

- Peut-on apprendre à philosopher en discutant ? Quelle peut être la place de l'oral dans l'apprentissage de la pensée ? Quel rapport de la pensée à la langue, à son code oral, et à l'interaction sociale verbale ?

- Comment se construit une pensée individuelle dans une discussion collective ? Dans une DP, n'y a-t-il interaction que de pensées individuelles ? Ou peut-il se construire une pensée collective ? La notion de pensée philosophique de groupe a-t-elle un sens ? Ou n'y a-t-il de pensée qu'individuelle ? Une synthèse peut-elle être celle de la progression d'une pensée collective, ou n'est-elle que celle de celui qui la fait ?

                     - Qu'est ce qu'amener à philosopher des enfants ? Et comment les faire passer du je individuel au je universel ? Y a-t-il une philosophie pour enfants, pour adolescents, pour adultes ? Ou la même philosophie adaptée selon l'âge ? Qu'est ce que philosopher pour un enfant ? Y a-t-il une différence de nature, de degré avec l'adulte ? Avec les philosophes ?

- La philosophie doit-elle être une discipline à l'école primaire, secondaire ? Ou une pratique plus qu'une matière ? Quelle place pour la philosophie dans la polyvalence de l'instituteur ? Doit-il y avoir des moments spécifiquement philosophiques, ou des moments philosophiques à l'occasion de chaque contenu disciplinaire ? La philosophie doit-elle être spécifique ou transversale ?

- Faut-il former à la philosophie avec les enfants/adolescents ? Si oui comment ? Quels repères sur les processus de pensée, les exigences intellectuelles, les techniques d'animation ? Doit-on avoir recours aux doctrines, à l'histoire de la philosophie, aux grandes problématiques ?

- Quelle  différence entre une question philosophique et une question qui ne l'est pas ? Comment identifier dans les questions des enfants celle qui sont philosophiques ? Comment entendre leurs questions philosophiquement ? Comment leur faire formuler des questions philosophiques ? Qu'est-ce qu'écouter philosophiquement ?

- Quelles compétences développe la DP chez les élèves ? De type disciplinaire (ex : en français, langue, communication), transversales ? Quels types de savoir, savoir-faire, savoir-être ? Comment situer les compétences développées par rapport à celles attendues par l'institution (ex : programmes) ? Qu'observe t-on du développement de ces compétences : dans une séance/sur plusieurs/sur plusieurs mois/plusieurs années ? Y a-t-il des retombées de la pratique de la DP sur d'autres disciplines (comportement, attitude face au savoir et au sens des connaissances scolaires ...) ?

- La DP est-elle une pratique révolutionnaire ? Dérange t-elle ? Quelles réactions de l'institution face à l'innovation ? Pourquoi ?

- Quel est le statut du maître pendant la DP ? Change t-il son rôle scolaire habituel ? Si oui en quoi ? Est-il perçu différemment par les enfants ? Quels effets produits ?

- Quelles sont les compétences nécessaires au maître pour animer une DP ? Quelles exigences pour qu'elle soit démocratique ? Quelles exigences intellectuelles pour qu'elle ne soit pas seulement démocratique, mais philosophique ?

- Comment évaluer l'efficacité d'une DP, son intérêt pour les élèves ? Faut-il noter les élèves pendant une DP ? Ou déscolariser au maximum ces moments, comme lieu d'une vraie prise de parole, sans jugement ?

- Pourquoi les DP plaisent-elles généralement tant aux enfants (ex : nouveauté, liberté, problèmes existentiels ...) ?

- Les DP font-elles réellement évoluer les positions des enfants (à court, moyen, long terme) ? A quoi servent-elles ?

- Comment réinvestir les pratiques démocratiques de la classe coopérative (Freinet, pédagogie institutionnelle), et du " conseil " sur le fonctionnement de la classe, dans des discussions sur un contenu, des problèmes philosophiques ?

- Comment passer d'un entretien de groupe où toute parole passe par le maître à une discussion entre pairs ?

- Comment dans une DP gérer des âges et niveaux différents ? Peut-on différencier dans une DP ?

- Doit-on s'en tenir à de l'oral, ou l'articuler avec de l'écrit ?

Quels sont pour l'apprentissage du philosopher les avantages et les inconvénients respectifs de l'oral et de l'écrit ? Comment articuler les premiers ?

- Comment gérer dans une DP avec des enfants l'affectivité ?

- En quoi la DP est-elle une situation où se croise l'intérêt de ceux qui s'intéressent

. à l'apprentissage de la langue, de l'oral, du français ;

. au débat comme forme d'apprentissage de la socialisation et de la démocratie, dans une perspective d'éducation à la citoyenneté ;

. à l'éveil de la pensée réflexive chez l'enfant, à l'apprentissage dialogique de la pensée, et du philosopher (didactique de la philosophie) ?

QUESTIONS SUR LA METHODE LIPMAN

- Comment appliquer intelligemment la méthode ?

- Quelle adaptation interculturelle aux réalités française, belge, québécoise par exemple ? Au niveau du vocabulaire, des situations etc ?

- Que faire si : les enfants se lassent du roman, s'ennuient, trouvent que c'est trop difficile, trop pauvre, ou pas assez à suspense, veulent savoir la fin ? Si les exercices sont trop à base de logique, répétitifs etc.

- Que penser des exercices ? Comment les choisir ? Les utiliser ?

-         Comment bricoler la méthode avec d'autres supports/outils ex : contes, mythes ; d'autres exercices (cf. Tozzi). Construire d'autres exercices ? Introduire de l'écrit ?

-          

                       

                           QUESTIONS-DIFFICULTES SUR LES DISPOSITIFS

-         La discussion philosophique (DP) doit-elle être un moment institutionnalisé ?

-         Quand(jour/heure) ? Combien de temps ? Quel est l'intérêt (ou pas) d'une institutionnalisation ?

- L'espace doit-il être aménagé ? Comment ? En rond, carré, en U ? Dans la même classe ou une autre (ex : polyvalente) ? Les enfants sont-ils derrière des tables, ou assis sans rien devant, sur une chaise ou par terre, avec ou sans stylo ?

- Doit-il y avoir une ritualisation ? Intérêt ou pas ? Si oui quels rituels (à l'ouverture, à la fermeture, mise en place, espace, répartition des fonctions, solennisation etc .) ?

 Qui anime ? Le prof, un élève, des élèves ? Coanimation ? Si oui sur quelle base ?

- Faut-il différencier des fonctions (Animateur, coanimateur, président de séance, preneur de notes, gestionnaire du temps, reformulateur, objecteur, synthétiseur, observateur sur le fond/la forme, donneur de micro etc.) ? Intérêt ou pas ? Quelles fonctions et dans quels buts ?

- Quelles règles de fonctionnement du débat (démocratique, philosophique) ? Imposées, proposées, coélaborées ? Explicitées ? Rappelées au début chaque fois, écrites, affichées ?  Qui est gardien des règles (Le prof, un élève, le groupe) ?

- Quelles règles pour donner la parole ? Lever la main, tour de table, tour de table des muets à la fin, volontariat, sur ordre d'inscription, par réactions spontanées, désignation, avec bâton de parole, avec un capital de 3 tickets seulement pour une ½ heure ? Faut-il donner la parole à tous, au maximum d'élèves ? A-t-on un jocker  si on est interpelé, le droit de se taire ? Qui donne la parole et comment ?

- Faut-il ou pas un bâton de parole (Objet symbolique qui donne le droit de parler) ? Faut-il ou pas un micro (voix amplifiée, traces ...) ? Si micro, qui le tient, le donne ? Où est-il : au milieu du cercle, à côté du prof ? L'enfant qui le tient est tourné vers qui ? L'enfant qui parle est-il assis, debout ? A sa place, se déplace ? Qu'est-ce que tous ces " détails " induisent sur l'élève, le groupe, la discussion ?

- Comment gérer le nombre d'élèves ? Prendre la classe entière, un responsable du silence, des élèves qui ne parlent pas mais ont une fonction (ex secrétaire) ? En coupant la classe en deux (autre partie avec collègue, aide-éducateur ? Si oui sur quels critères (ordre alphabétique, sociogramme, cours multiples, cycles dans classe unique ...) ?

- Comment gérer les apartés ? Ont-ils une fonction pour les élèves dans un débat ? Faut-il les pourchasser systématiquement ? Les utiliser, parfois les institutionnaliser ?

- L'enseignant doit-il intervenir sur le fond (dire ce qu'il pense, redresser une erreur - faits inexacts, raisonnement incorrect, objecter ...) ? Ou rester en retrait : ne pas du tout intervenir, ou se contenter de gérer le débat (répartition de la parole et régulation socio-affective) ? Quels effets produits s'il conduit avec rigueur, interroge - à la cantonade, nominativement ?

- Faut-il une progression dans le débat, ou laisser dériver ? Faut-il  recentrer ? A-t-on prévu différentes phases (ex conceptualiser puis argumenter. Ou expression libre puis justifications puis d'accord/pas d'accord parce que) ? Faut-il  préparer un débat (prof-élèves) ? L'enseignant doit-il avoir un fil conducteur ?

- Faut-il des synthèses, partielles, finales ? Quelle serait leur fonction ? Toute synthèse est-elle réduction, fermeture, ou engrangement ? Comment la concevoir, la structurer ? Quelle longueur ? Doit-elle faire trace ? Qui la fait ?

- Garde-t-on des traces de ce que l'on dit ? Si oui pourquoi ? Et comment ? Utilise-t-on le tableau ? Des synthèses dictées ? Une restructuration individuelle ? Enregistre-t-on les débats ? Si oui pourquoi ? Quels effets induits au niveau psychologique et psycho-sociologique par le micro, la bande magnéto, la vidéo ? Quelles utilisations pédagogiques ? Et pour la recherche ?

- Comment faciliter la production d'idées, les processus de pensée ?

- Comment réguler psycho et socio-affectivement le groupe d'enfants ou d'adolescents ?- Faut-il reformuler ce qui vient d'être dit ? Quel intérêt ? Qui doit reformuler ? Qu'est-ce que reformuler ? Quelles fonctions ? Comment faire ? Jusqu'où interprêter ?

- Quel intérêt de moments métacognitifs, où l'on réfléchit collectivement sur le fonctionnement de la discussion (psycho-sociologique et cognitif), et ne discute plus sur le fond ?

- Faut-il des supports écrits (romans, contes, textes) ? Quelle utilisation ? Faut-il lire soi-même et/ou faire lire les enfants ? Comment leur faire poser des questions sur le texte (pas seulement de compréhension ou factuelles, mais philosophiques) ?

- Qui choisit les questions retenues (prof,  élèves), et comment (ex : vote) ? Et à partir de quoi (connaissances du cours, évènement de classe, actualité, support écrit ou audiovisuel, boîte à questions philosophiques dans la classe ... ) ?

- Comment peut-on articuler la DP orale avec un écrit où les élèves réinvestissent des notions, arguments ?

- Comment moduler les dispositifs en fonction des objectifs poursuivis, des supports utilisés, de l'âge des élèves, du degré du curriculum (CP/CM2), de leur niveau scolaire (Harry trop pauvre ou difficile !), du contexte (rural/urbain, France/Belgique, quartier favorisé/banlieue, classe unique ou à cours multiples ...) ?

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Date de création : 26 octobre 2001
Date de révision : 26 octobre 2001